Un chèque est dit « sans provision » ou en bois lorsque le compte auquel il est rattaché ne comporte pas la somme indiquée sur ce moyen de paiement. Lorsqu'elle reçoit un chèque sans provision, la banque est obligée d’avertir l’émetteur de la situation avant de rejeter le chèque. Il a donc la possibilité de régulariser la situation. Si le compte n’est pas réapprovisionné dans un délai fixé par la banque, le chèque en bois sera rejeté et son émetteur sanctionné par une interdiction bancaire. Voici les conséquences pratiques de l'émission d'un chèque sans provision et la conduite à tenir pour le bénéficiaire lésé.
Conséquences de l'émission d’un chèque sans provision
Si faute de provision sur un compte, un chèque ne peut pas être payé, il est rejeté et revient impayé au bénéficiaire. Avant de refuser le paiement d’un chèque, la banque doit avertir « par tout moyen approprié » l’émetteur des conséquences du défaut de provision. Cet agissement peut en effet lui valoir une interdiction bancaire, des poursuites pénales pouvant aussi être engagées si le chèque a été émis dans le dessein de tromper autrui.
Régularisation possible
Une fois averti, l’émetteur peut régulariser la situation en :
- reconstituant une provision suffisante pour que le chèque puisse être honoré ;
- réglant directement le bénéficiaire du chèque par un autre moyen (des espèces par exemple). La récupération du chèque non payé et sa présentation à la banque sont acceptées comme preuve de paiement des sommes dues ;
- demandant à la banque de bloquer la somme correspondant au montant du chèque pour que celui-ci soit payé.
En l'absence de régularisation
Interdiction d'émettre des chèques
Si l’émetteur du chèque n’approvisionne pas son compte dans le délai indiqué par la banque, il recevra une lettre d’injonction l'avisant de l’incident de paiement et lui demandant de ne plus émettre de chèque. Il doit alors restituer tous les chèques (même issus d’autres banques) qu’il détient.
En parallèle, la banque est tenue d'enregistrer les incidents de paiement et de faire une déclaration à la Banque de France dans un délai de 48 heures. Ce signalement a pour conséquence d’aboutir à :
- l’inscription du titulaire du compte sur le Fichier central des chèques de la Banque de France ;
- l’interdiction d'émettre des chèques pendant une durée maximale de 5 ans (article L.131-78 du Code monétaire et financier) si aucune régularisation n'intervient.
À noter : si le titulaire a plusieurs comptes, l’interdiction les concerne tous.
Frais bancaires
Par ailleurs, l’émetteur du chèque s’expose à supporter des frais bancaires limités à 30 € pour les chèques sans provision inférieurs ou égaux à 50 € ; et à 50 € pour ceux d’un montant supérieur à 50 €.
Depuis le 1er février 2019, suite à un engagement pris par la profession bancaire, les frais bancaires d'incidents de toute nature sont plafonnés à 25 € par mois pour les personnes en situation de fragilité bancaire. À compter du 30 juin 2019, ils sont plafonnés à 20 € par mois et 200 € par an pour les clients ayant souscrit à l'offre bancaire spécifique dédiée aux personnes en situation de fragilité financière.
Le décret n° 2020-889 du 20 juillet 2020 modifie les critères d'appréciation de la situation de fragilité financière de leurs clients par les établissements de crédit. Désormais, un client est considéré comme fragile : à la suite d'irrégularités de fonctionnement de compte ou d'incidents de paiement répétés pendant trois mois consécutifs et en particulier s'il cumule 5 irrégularités ou incidents de paiement au cours d'un même mois ; s'il a un dossier de surendettement en cours de traitement ; ou s'il est inscrit pendant 3 mois consécutifs au fichier de la Banque de France centralisant les incidents de paiement (article R. 312-4-3 du Code monétaire et financier).
Bon à savoir : fin 2017, le Conseil consultatif du secteur financier (CCSF) a lancé une enquête afin de vérifier si le chiffre d’affaires que les banques réalisent avec les incidents bancaires n’est pas excessif. Selon une enquête de 60 millions de consommateurs, ce chiffre d’affaires dépasserait « des milliards d'euros ».
À noter :si un chèque sans provision est émis sur un compte joint, tous les titulaires se retrouvent interdits non seulement sur le compte joint, mais aussi sur leurs comptes personnels. Toutefois, les titulaires peuvent désigner à la banque l’un d’entre eux qui, sera seul interdit d’émettre sur l’ensemble de ses comptes en cas d’incident de paiement.
Réception d’un chèque sans provision : se défendre
Si un usager a été payé avec un chèque en bois, 2 cas de figure sont possibles :
- si le montant du chèque est inférieur à 15 €, sa banque est tenue de le payer dans un délai de 30 jours à partir de la date d’émission, qu’il y ait ou non provision sur le compte de l’émetteur ;
- si le montant est supérieur à 15 €, la banque adresse à l’usager une attestation de rejet de chèque pour défaut de provision.
Si le chèque n'est pas honoré dans un délai de 30 jours à partir de sa première présentation, ou faute de la constitution de provision par l’émetteur dans ce délai, l'usager lésé peut :
- demander à sa banque un certificat de non-paiement ;
- effectuer une nouvelle présentation du chèque à l’encaissement.
Il doit alors faire notifier le certificat de non-paiement au débiteur par lettre recommandée avec AR ou mandater un huissier de justice qui signifiera le certificat de non-paiement à l’émetteur du chèque sans provision.
Ces 2 procédés valent commandement de payer. Le débiteur doit payer la somme et les frais dans un délai de 15 jours. Faute de quoi l’huissier pourra entamer les différentes procédures d’exécution forcée (saisie mobilière, saisie sur rémunération par exemple) pour récupérer le montant du chèque en bois ainsi que tous les frais engagés.
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